L'église de BERNEUIL (17)

Texte intégral de Charles CONNOUË
Photos d'ALAIN DELIQUET (en soirée)


Les photos sur ce site peuvent être utilisées exclusivement à des fins non commerciales 
après autorisation et sous réserve de mentionner la source.

(Commune du Canton de Gémozac au Nord-Est du Chef-lieu et à 14km de Saintes)

L'église de Berneuil placée sous le vocable de Notre-Dame est un des édifices intéressants de la banlieue de Saintes. Construit au XIIe siècle, il a été presqu'entièrement détruit d'abord par les Anglais, puis par les Protestants. Il fut en partie rebâti au XIVe siècle puis au XVIIe.
Classée Monument Historique le 2 Janvier 1907, cette église a été restaurée par les Beaux-Arts vers la même époque. Malheureusement les reconstructions anciennes furent faites sans souci de styles, de sorte que l'édifice est aujourd'hui un curieux assemblage de parties très remarquables et de banalités.



Le clocher a beaucoup souffert au cours des luttes passées. Toutes les voûtes furent " rompues"  La façade, le mur Nord de la nef, une grande partie du chevet furent en outre détruits , pendant de longues années il ne resta debout qu'un quart environ du clocher et le mur latéral Sud.
Les habitants puisèrent alors abondamment dans l'amas de décombres voués aux ronces et aux orties pour construire leurs maisons, ce qui explique que l'on trouve enclavées dans les murs de Berneuil beaucoup de pierres sculptées provenant de l'église " (Abbé Denis).

La flèche détruite, remplacée aujourd'hui par un pignon d'ardoise posé de guingois sur ce qui subsiste du troisième étage du clocher, pouvait avoir quelqu'analogie avec celle de l'Abbaye de Saintes. Ce qui demeure de sa base, le petit dôme qui surmonte la tour d'escalier, les fenêtres romanes très ornées et les clochetons d'angles montés sur leurs fines colonnettes, peuvent autoriser cette supposition.


Du clocher seules les faces Est et Sud sont demeurées dans leur état primitif. Les deux autres ont été remplacées par des murs droits sans ornementation.
Ces deux faces conservées constituent l'une des belles pages architecturales de la Saintonge. L'art roman s'y montre dans toute sa pureté et toute son élégance. La base et le premier étage de ce clocher sont du début du XIIe siècle , le deuxième étage est de la fin du même siècle.



A cette époque le roman est a son apogée, aussi les fenêtres de ce deuxième étage sont-elles dignes en tous points de retenir l'attention.

 Le troisième étage est du XIIIe. La disparité des diverses faces de ce clocher fait que l'impression qu'il produit est entièrement différente suivant qu'il est vu du Nord ou du Sud.



La façade, avec son minuscule portail et son haut mur à peu près nu, a été au moment de la reconstruction rapprochée du choeur d'environ 5 mètres, raccourcissant d'autant la longueur de l'ancienne nef dont on voit encore devant la porte sur le sol dallé les premières limites. A l'autre extrémité de l'édifice, l'abside autrefois demi-circulaire a été coupée par un mur plat, ce qui a réduit très sensiblement sa longueur.
L'intérieur de l'église offre des traces nombreuses de destruction et de remaniements. La nef est à quatre travées et demie (la première ayant été tronquée par le déplacement de la façade). Elle est recouverte d'un simple plafond de bois comme le choeur et l'abside. Le mur Nord entièrement reconstruit est nu et sans intérêt, mais le mur Sud, contemporain de l'église d'origine, est remarquable. Les aires sont séparées par de hautes et fortes demi-colonnes adossées à des pilastres dont les angles rentrants sont occupés par des quarts de colonnes. Des arcs latéraux en plein-cintre à double ressaut joignent ces piliers et encadrent des fenêtres également en plein-cintre. L'ensemble, simple mais de belle élévation a une réelle grandeur.
A la nef fait suite le carré du clocher limité par quatre massifs piliers de maçonnerie réunis à grande hauteur par trois arcs romans et un ogival ouvrant sur le choeur. Ce carré était autrefois recouvert d'une coupole.
La travée qui suit ouvre à droite et à gauche sur des chapelles carrées formant transept. Les piliers de ces ouvertures sont réunis par des arcs ogivaux.
L'abside très courte, coupée par un mur plat, n'offre aucun intérêt.
Sous la chapelle de droite existe une vaste crypte voûtée en berceau. On y accède par un difficile escalier d'une quinzaine de marches qui aboutit a une étroite banquette de pierre faisant, à 2 mètres de hauteur environ, le tour de l'ossuaire. Sur le sol en contre-bas sont symétriquement empilés, sur 60 à 80 centimètres de hauteur, des milliers d'ossements humains formant aujourd'hui un bloc presque compact. La rumeur publique prétend " que ce sont des Anglais ". Ce ne serait pas impossible, mais il faut plutôt voir là les restes des victimes d'un violent combat qui eut lieu pendant les troubles de la  Fronde en 1652 aux environs de Préguillac, la Jard et Berneuil, entre les royaux d'une part commandés par le comte d'Harcourt et les Frondeurs d'autre part, conduits par Ch. de la Tremoille, prince de Tarante.
Sur la façade, sur le mur Nord de la nef, ainsi que sur celui du chevet, en un mot sur tous les murs reconstruits, on distingue çà et là d'assez nombreux masques encastrés dans la maçonnerie et formant saillies. Ce sont les anciens modifions de la partie détruite du clocher. Ils sont semblables à ceux qui soutiennent encore la corniche séparant le premier et le deuxième étage du dit clocher.
La cloche qui date de 1786 a été classée au Mobilier Historique le 25 Juillet 1908.

 ___________________________________________________Texte de Charles CONNOUË 

Les églises de la SAINTONGE

(livre 1 épuisé)

édition: R.DELAVAUD à SAINTES 

avec leur aimable permission.____________________________


L'album photos de BERNEUIL


Vers l'Art Roman en Saintonge