L'église
romane d'ARS (16)
Commune du Canton de COGNAC (à 8 kilomètres au, Sud-Ouest de Cognac) ARS (Charente)![]() La pittoresque église d'Ars est plus intéressante à visiter que ne le fait supposer son modeste aspect extérieur. Elle abrite, en effet, un ensemble de détails remarquables qu'il est rarement donné de voir réunis dans une église rurale. Son peu d'élévation frappe d'abord (elle semble s'être à moitié enfoncée dans la terre), ainsi que son apparence hétéroclite et même désordonnée, mais c'est un édifice très ancien qui a souffert maintes fois et beaucoup et qui fut au cours de sa longue existence plus souvent « rafistolé » que restauré. Ars vient d'un vieux mot qui signifie citadelle. Cette étymologie éclaire le passé de la paroisse, de son église et de son château qui gardait un passage du Né. Les restes les plus anciens de cette construction datent pour le moins du XIIe siècle. Ils sont tous réunis sur ce qui subsiste du rez-de-chaussée de la façade et autour de l'abside. La façade, encombrée d'un clocher ajouté au XVIIIe siècle, comprend un portail roman à quatre voussures légèrement brisées, bien ornées et accompagnées chacune d'un cordon. ![]() Le premier arceau est garni de losanges, le deuxième de demi-besants opposés ; le troisième d'S massives et le plus grand de triangles. Les colonnes et les pilastres des pieds-droits ont de beaux chapiteaux. A droite, une baie aveugle à une seule voussure pareillement décorée est traversée d'un bandeau de feuillage superbement sculpté qui se prolonge jusqu'à l'angle Sud Ce bandeau égale par la qualité de son exécution les plus belles sculptures de la Saintonge. ![]() Une baie semblable existait sur la partie gauche. Effondrée ou abattue, elle est aujourd'hui remplacée par la base d'un clocher, grosse masse presque cubique, trouée ça et là de quelques ouvertures en plein cintre et qui, plaquée sur la façade, fait saillie en avant. L'angle mort ainsi créé, recouvert d'un léger auvent porté par une murette basse, constitue un « ballet » commode peut-être, mais bien inesthétique et peu en rapport avec les beautés voisines et celles de l'intérieur qui illustrent si justement cette église. Le portail est surmonté d'un pignon obtus dont les rampants taillés en marches forment escalier avec, immédiatement derrière, un second pignon plus élevé et à ressauts troué de deux larges baies campaniles. L'escalier desservait avant la construction du clocher actuel, les baies de ce deuxième pignon aujourd'hui coupé à gauche par les étages du clocher. ![]() L'abside très petite, demi-circulaire et consolidée par des colonnes contreforts portant une corniche à modillons aujourd'hui informes, n'offre extérieurement rien de spécial. ![]() Il n'en sera pas de même de l'intérieur, autrefois en forme de croix latine et que l'adjonction à gauche d'une chapelle à plusieurs travées a transformé, au XVme siècle, en un vaste rectangle à deux nefs où l'on descend par quelques marches. ![]() De grosses colonnes cylindriques courtes, sur lesquelles viennent se perdre les nervures gothiques d'une ancienne voûte, séparent les nefs cou- vertes l'une et l'autre d'un tillis. Le mur droit paraît fort ancien, il est nu et simplement percé de fenêtres inégales de différents dessins. En avant de l'abside, deux baies en plein cintre donnent à droite et à gauche accès à deux chapelles. Celle de gauche est la sépulture de l'ancienne famille de Brémond d'Ars, comme le mentionne une longue inscription latine sur un pilier. Ces deux chapelles couvertes en ogive à huit branches ont eu les écussons de leurs grosses clés martelés à la Révolution. L'abside, autrefois percée de cinq fenêtres, est aujourd'hui presqu'entièrement occupée par un splendide rétable à deux retours. Ce magnifique travail du XVIIe siècle, commence la série des curiosités de l'église d'Ars. De forme monumentale et superbement décoré de sculptures variées, frise, cordons et panneaux, de colonnes droites ou torses, de chapiteaux corinthiens, de statues, vases et peintures, ce rétable mérite un long examen. Le devant d'autel est en cuir de Cordoue repoussé, entouré d'un cadre de bois sculpté. Un autre rétable orne la chapelle de gauche. Celui-ci est en pierre et quoique de moindre dimension et démuni de personnages, représente néanmoins une oeuvre de qualité, importante et d'une belle exécution. Un troisième et un quatrième qui ornent des autels auxiliaires sont aussi, quoique plus simple à remarquer. Ces rétables font penser, couleurs et poutres de gloire en moins, aux églises de Bretagne. ![]() Dans la deuxième nef existe une très curieuse cuve baptismale, véritable chef-d'œuvre de sculpture ancienne. Certains l'ont qualifiée de « perle archéologique ». Cette cuve, qui daterait du XIIIe siècle, est en calcaire très dur et à la forme d'un gros cube ; elle mesure environ 1 mètre de haut et 1 m. 5o de côté. Chaque angle est occupé par un personnage debout (saint ou évêque). Les têtes sont réunies par un gros bandeau sculpté encadré de deux câbles torsadés. Sur une face un énorme griffon, sur une autre trois oiseaux de proie, sur une troisième un aigle éployé dont deux personnages à genoux tiennent d'une main une patte, de l'autre une aile. La quatrième, mutilée et martelée, laisse apercevoir un personnage central debout. Cette cuve est inscrite au Mobilier Historique. Il faut signaler encore le très beau bénitier en marbre sculpté, travail du XVIIIe siècle. La vasque ovale est richement, ornée de quatre grosses tètes d'anges ailées, réunies entre elles par des guirlandes de fleurs superbement exécutées. Le pied-support carré a ses angles arrondis garnis de feuilles d'acanthe. L'église d'Ars est dédiée à saint Maclou. L'édifice en entier a été classé le 26 janvier 1981, le mobilier ayant été classé auparavent. ____________________Fin du texte de Charles CONNOUË Les
églises de SAINTONGE édition: R.DELAVAUD (Saintes) avec leur aimable permission._______________________________
N.B. Des photos sont bienvenues, je citerai l'auteur |